
Comment les réformes économiques redonnent de l’élan au marché boursier brésilien
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Le 29 janvier 2020
Quand le président brésilien Jair Bolsonaro a remporté le deuxième tour de l’élection présidentielle d’octobre 2018 qui allait le porter au pouvoir, les investisseurs se sont montrés beaucoup plus réceptifs à ses promesses de réforme économique qu’aux avertissements des modérés sur ses politiques sociales populistes d’extrême droite, et les actions brésiliennes ont bondi.
Pourtant, il était loin d’être acquis que les bonnes choses dureraient. Bolsonaro, qui est un ancien officier militaire, ne connaît pas grand-chose à l’administration, encore moins à celle du Brésil, réputée pour sa complexité. Nombre de dirigeants avant lui s’étaient engagés à s’attaquer au délabrement et à l’inefficacité de l’économie (certains sont même passés près de réussir), mais tous ont échoué. Donc, si vous aviez conclu en octobre 2018 qu’il y avait peu à attendre des promesses de réforme de Bolsonaro et de l’optimisme des investisseurs à l’égard de ce marché émergent, l’histoire vous aurait donné raison.
Eh bien vous auriez eu tort.
L’enthousiasme des marchés n’est pas retombé, ou il s’est tout au moins ravivé au dernier trimestre de 2019, et le Brésil a été un des marchés boursiers les plus performants de l’année. Malgré la faiblesse de la croissance du PIB (moins de 1 %) et des résultats des entreprises, l’indice MSCI Brésil a gagné 20,25 % en 2019, soit un résultat largement supérieur à celui de l’indice MSCI Marchés émergents, en hausse de 12,87 %. Cette surperformance est en grande partie attribuable à Bolsonaro, qui a confondu les sceptiques et commencé à tenir ses promesses, y compris la plus importante : faire adopter une loi pour réformer le système de retraite extrêmement généreux du Brésil, qui représente près de la moitié des dépenses du gouvernement fédéral (malgré la relative jeunesse de la population) et qui est en déficit depuis des années.
Pour comprendre ce que les réalisations de Bolsonaro ont de révolutionnaires, il faut remonter à 2012. La fin du boom mondial des produits de base, qui durait depuis une décennie, a touché le Brésil de plein fouet, les matières premières représentant près de la moitié des exportations totales du pays. Le gouvernement de Dilma Rouseff a essayé, mais en vain, de juguler le repli par une hausse du crédit et des dépenses, mais ces mesures n’ont rien donné; en 2014, l’économie s’est enfoncée dans la récession. La chute des recettes fiscales, conjuguée aux facteurs démographiques, a rapidement creusé le déficit des retraites.
La baisse des dépenses discrétionnaires et la reprise économique de 2017 ont permis au Brésil de renouer avec les excédents budgétaires, mais seulement si on ne compte pas les dépenses liées aux retraites. En 2018, le système de retraite affichait un déficit de 194 milliards de réaux brésiliens (environ 60 milliards de dollars canadiens), selon les données publiées l’an dernier par Bloomberg. Bolsonaro a donc hérité d’un excédent de près de 2,5 % du PIB si l’on exclut la sécurité sociale, mais d’un déficit primaire de 1,5 % du PIB si on inclut la sécurité sociale.
Une importante réforme des retraites était donc nécessaire pour stabiliser la situation budgétaire du Brésil à moyen et long termes. En octobre dernier, Bolsonaro l’a mise en place. Là où les gouvernements précédents avaient échoué pendant des décennies, il a travaillé avec un Congrès notoirement récalcitrant pour faire adopter un programme de réforme des retraites d’environ 800 milliards de réaux brésilien (250 milliards de dollars canadiens), ce qui correspond, selon les chiffres du gouvernement, à 9,4 % du PIB de la prochaine décennie.
Il s’agit bien sûr d’un véritable exploit, qui ouvre la voie à de futures réformes. Toujours selon les chiffres du gouvernement, celles-ci incluent un amendement au « pacte fédératif », qui transférerait sur 15 ans 400 milliards de réaux brésiliens (125 milliards de dollars canadiens) du niveau fédéral aux états et aux municipalités; un amendement sur « l’urgence budgétaire », qui permettrait de libérer 50 milliards de réaux brésiliens (15 milliards de dollars canadiens) sur 10 ans; et un amendement sur les « fonds publics », qui permettrait de récupérer 220 milliards de réaux brésiliens (69 milliards de dollars canadiens).
À long terme, cet ensemble de réformes pourrait permettre d’assainir le climat politique et budgétaire inefficace et propice à la corruption qui mine l’économie brésilienne depuis très longtemps. Et il pourrait mener à la mise en place d’un cadre susceptible d’insuffler un peu de rigueur dans le budget du Brésil, d’aider le pays à reprendre le contrôle de son endettement et de mettre un frein à la mauvaise gestion budgétaire des états et des municipalités.
Qu’est-ce que cela signifie pour les investisseurs? D’abord et avant tout, le Brésil pourrait retrouver son statut d’investissement de qualité d’ici un an environ. Et, dans la mesure où l’incertitude budgétaire et politique a contribué à ses déboires économiques, une poursuite du cycle de réformes devrait se traduire par une augmentation des investissements et de la croissance.
Le gouvernement a de nombreuses réformes administratives et fiscales de prévues pour 2020/2021. La banque centrale joue également un rôle : elle a ramené ses taux d’intérêt à 4,5 % (un plancher record) et travaille rapidement à déréglementer les services financiers, notamment dans le secteur des technologies financières. Parallèlement, la confiance des consommateurs est en hausse. De nombreuses entreprises intensifient leurs programmes de croissance; les fusions et acquisitions se multiplient après avoir été à peu près inexistantes pendant des années. Si ces tendances se maintiennent, le climat économique et d’investissement pourrait changer au Brésil, pour s’ouvrir davantage aux produits et services, intégrer plus d’innovation et de déréglementation, et tourner le dos à la réglementation publique et réduire la dépendance à l’égard des produits de base.
Sous Bolsonaro, l’économie du Brésil a finalement peut-être commencé à opérer un virage, mais les prochains mois nous diront si elle peut poursuivre sur le chemin de la réforme. L’an dernier, l’optimisme des investisseurs avait permis au marché boursier brésilien de gagner du terrain; cette année, une véritable croissance des bénéfices sera nécessaire pour que les valorisations puissent augmenter. Pour résumer, 2020 sera une année de test pour les actions brésiliennes, et pour l’héritage économique de Bolsonaro.
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