
La Fed et la règle des trois
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Le 27 juillet 2021
Au cours des trois prochains mois, la Réserve fédérale américaine (Fed) tiendra trois réunions importantes : les décisions de politique monétaire du 28 juillet et du 22 septembre et, dans l’intervalle qui les sépare, le symposium sur les politiques économiques, qui aura lieu à Jackson Hole du 26 au 28 août. Ces événements pourraient bien être les activités les plus importantes et les plus surveillées de la Fed en 2021 en raison de leurs conséquences sur les taux d’intérêt, la politique et, bien sûr, les marchés financiers.
Tout d’abord, récapitulons les éléments qui sont ressortis de la dernière réunion du Comité de politique monétaire (FOMC) de la Réserve fédérale américaine, le 16 juin dernier. Contre toute attente, la Fed a durci le ton : elle a revu à la hausse ses estimations de la croissance du PIB et de l’inflation aux États-Unis, tout en allant de l’avant avec ses prévisions consensuelles quant au moment d’un relèvement potentiel des taux. Les taux obligataires américains ont d’abord bondi, sous l’effet d’une réaction impulsive reflétant la possibilité d’une hausse des taux d’intérêt. Toutefois, les taux ont par la suite fléchi parce que la perspective d’un resserrement de la politique monétaire (compte tenu du fait notamment que la Fed avait commencé à discuter de la réduction des achats d’obligations) a visiblement pesé sur les prévisions de croissance et d’inflation. Le président de la Fed, Jerome Powell, a insisté pour réaffirmer l’engagement de la Fed à maintenir les mesures de relance jusqu’à ce que le plein emploi soit atteint, mais il semblerait que le scepticisme persiste. Il est également probable que les préoccupations grandissantes quant aux aspects transitoires de l’inflation et à la propagation rapide du variant Delta aient pesé sur les taux.
De ce fait, la barre semble haute pour la Fed, qui devra communiquer efficacement ses intentions. Compte tenu de la vigueur de la reprise, il pourrait être de plus en plus difficile de défendre les mesures d’urgence comme le rythme actuel du programme d’assouplissement quantitatif. La Fed souhaite probablement éviter un resserrement préventif parce qu’on lui a déjà fait des reproches à ce sujet par le passé, surtout en raison de sa nouvelle politique de cibles d’inflation moyennes flexibles, qui met l’accent sur le plein emploi et privilégie une approche plus tolérante à l’égard de l’inflation. En conséquence, nous prévoyons que la Fed adoptera un ton plus conciliant mercredi, en reportant la réduction du programme d’assouplissement quantitatif. Il est également probable qu’elle tentera de dissuader le marché de prévoir des hausses de taux en 2022, en laissant entendre qu’un relèvement est peu probable avant 2023. Pareil message pourrait entraîner une nouvelle hausse des taux obligataires à long terme. La Fed y verrait alors un signe de rapprochement de son objectif général de plein emploi.
Suivra ensuite la conférence de Jackson Hole. De nombreux observateurs sont d’avis que la réduction du programme d’assouplissement quantitatif pourrait être annoncée à ce moment-là, mais la Fed pourrait être encline à attendre encore plus longtemps. Plusieurs déclarations intéressantes ont été faites au cours de ce symposium dans le passé. Le plus souvent, l’accent a été mis sur le sujet principal de l’événement, qui n’a pas encore été annoncé cette année, plutôt que sur la politique monétaire courante. De plus, il ne s’agit pas d’une réunion officielle du FOMC, et il se peut bien que la Fed préfère le contexte de ses réunions régulières pour apporter des changements à sa politique.
Cela nous amène à la réunion de septembre. Non seulement le report des décisions de réduction des assouplissements jusqu’à ce moment-là laisse le temps d’adopter une approche plus conciliante, mais aussi cette réunion coïncide avec la prochaine publication du sommaire des projections économiques de la Fed (communément appelé le graphique à points). Il importe de souligner à propos de ce sommaire des projections économiques qu’il sera le premier à intégrer des prévisions pour 2024, un moment idéal pour apporter des rajustements à la politique.
La politique est un autre facteur dans tout cela. Le président américain Joe Biden a la possibilité de remanier entièrement le conseil des gouverneurs de la Fed. Comme l’un des sept postes est vacant et que les mandats des trois principaux gouverneurs de la Fed (Randy Quarles, Richard Clarida et, surtout, Jerome « Jay » Powell) prendront fin au cours des six prochains mois, le président Biden pourrait nommer jusqu’à quatre nouveaux dirigeants avec l’approbation du Sénat. Grand favori, M. Powell devrait conserver la présidence, mais rien n’est pas gagné d’avance. Il ne fera rien pour diminuer ses chances d’être renommé. Par conséquent, conformément au thème des « trois », il semble plus probable que Joe Biden finira par nommer trois nouveaux candidats. D’une façon ou d’une autre, il s’agit encore d’une autre raison pour la Fed de faire preuve de patience et de reporter à au moins septembre l’annonce d’une réduction des assouplissements.
Qu’en est-il des marchés? Si la Fed assouplit sa position et parvient à communiquer ce message, la courbe des taux devrait s’accentuer pendant que les taux à court terme demeurent stables et que les taux à long terme augmentent. Toutefois, nous ne nous attendons pas à des ventes massives d’obligations de la même ampleur qu’au premier trimestre, car les prévisions de croissance et d’inflation ne devraient pas surprendre autant. Dans ce scénario, les marchés boursiers pourraient revenir aux occasions cycliques après avoir favorisé la croissance au cours des derniers mois. En effet, les secteurs plus exposés à une reprise cyclique ont rebondi de façon spectaculaire la semaine dernière, après le délestage qui s’est terminé lundi. Néanmoins, il y aura beaucoup à assimiler au cours des trois prochains mois et, après une remontée aussi forte, le marché pourrait avoir tendance à se replier si le message au sujet de la politique monétaire n’est pas interprété favorablement.
David Stonehouse est vice-président principal et chef des investissements nord-américains et spécialisés à Placements AGF Inc. Il contribue régulièrement à Perspectives AGF.
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