
Les effets d’un resserrement de la politique monétaire se font sentir
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Le 26 janvier 2022
L’inflation doit-elle être freinée par les banques centrales? Ou ralentira-t-elle naturellement, lorsque les dispositifs de relance des gouvernements commenceront à s’épuiser et que les conditions économiques reviendront finalement à la normale, après le passage de la dernière vague en date de la pandémie? Kevin McCreadie, chef de la direction et chef des investissements d’AGF, explique en quoi les mesures envisagées en réponse à cette question inquiètent les investisseurs et pourquoi tout semble réuni pour que la volatilité du marché s’accroisse à l’avenir.
Comme vous l’aviez annoncé dans les Perspectives d’AGF, l’inflation et la hausse escomptée des taux d’intérêt ont accentué la volatilité des marchés, en ce début d’année. Y a-t-il quelque chose qui vous a surpris dans le repli récemment observé sur les marchés boursiers et dans l’augmentation subséquente des taux de rendement obligataire?
Les marchés suivent, dans les grandes lignes, la trajectoire que nous avions anticipée, et ce, pour les raisons que nous avions majoritairement pressenties. Cela dit, les dernières semaines n’ont pas été entièrement prévisibles, pour autant.
Tout d’abord, la Réserve fédérale américaine (la Fed) a adopté un ton nettement plus tranché à propos d’un resserrement de sa politique, au vu de la montée de l’inflation par rapport à ce qu’elle était, il y a quelques mois. Il faut se rappeler que la Fed n’a commencé à réduire son programme d’assouplissement quantitatif qu’au mois de novembre et qu’elle a attendu la mi-décembre pour revoir son diagramme des taux d’intérêt : elle table maintenant sur trois hausses en 2022 et trois autres en 2023. Avant cela, ce diagramme montrait que la plupart des membres de la Fed prévoyaient une seule hausse pour cette année.
Par ailleurs, plus tôt ce mois-ci, la Fed a publié le compte-rendu de sa réunion de décembre, dans lequel elle détaille son plan visant à réduire son bilan, qui frôle aujourd’hui les 9 000 milliards $US. Pour cela, elle commencera à ne plus renouveler ses obligations à échéance, et ce, peu de temps après qu’elle aura entamé le relèvement de ses taux. Par conséquent, non seulement la plupart des investisseurs sont confrontés à une hausse certaine des taux d’intérêt cette année, mais ils font maintenant également face à la perspective d’un resserrement quantitatif, ce qui réduira la liquidité du marché bien plus tôt que ce que la majorité d’entre eux avaient envisagé.
Tous ces événements ont provoqué l’impressionnant recul observé parmi les actions de sociétés de croissance à long terme, dont les bénéfices – voire la capacité de générer un profit – sont plus vulnérables à la hausse des taux d’intérêt que ceux des titres cycliques axés sur la valeur, lesquels ont été plus performants dernièrement. Bien entendu, un autre point vient attiser cette rotation : de nombreuses actions de croissance ont vu leurs évaluations s’accroître excessivement par rapport à celles des titres axés sur la valeur, ces dernières années, et une correction était peut-être nécessaire dans tous les cas.
Autrement dit, le marché s’ajuste en prévision de conditions monétaires bien plus strictes que ce à quoi les investisseurs ont été habitués ces deux dernières années. Le processus est certes éprouvant, mais si la Fed et d’autres banques centrales adoptent une approche modérée, cela pourrait donner lieu à de nouvelles occasions, de même qu’à des rendements boursiers supérieurs à ceux enregistrés jusqu’à présent, cette année.
Qu’adviendra-t-il si la Fed ne fait pas preuve de modération et que son plan visant à resserrer la politique monétaire s’avère trop rigoureux?
La Fed et d’autres banques centrales, y compris la Banque du Canada (BdC), ont de bonnes raisons de vouloir se montrer peu conciliantes. La principale est, bien sûr, de juguler l’inflation, dont le rythme est le plus soutenu depuis des décennies et dont le taux est nettement supérieur à l’objectif fixé par les banques centrales, aux États-Unis comme au Canada. De plus, un resserrement dans l’immédiat – alors que l’économie progresse à un bon rythme – signifie que la Fed et la BdC seront mieux positionnées pour assouplir leurs politiques la prochaine fois que la croissance économique vacillera de façon grave et prolongée.
Le risque qui se pose aux investisseurs n’est donc pas tant celui du resserrement, mais celui de sa mise en œuvre : la préoccupation majeure concerne la possibilité que les banques centrales commettent une erreur qui, sous l’effet d’un resserrement excessif, entraînerait accidentellement un ralentissement économique. Cette préoccupation est particulièrement présente chez les investisseurs qui pensent que l’inflation diminuera au cours des prochains mois, indépendamment des programmes prévus par la Fed et les autres banques centrales. Toutefois, même ceux qui estiment qu’il faudra plusieurs hausses des taux pour maîtriser l’inflation doivent faire preuve de prudence : les risques liés à un resserrement exagéré ou trop rapide de la politique monétaire sont élevés et pourraient déboucher sur une volatilité encore plus forte que celle que nous connaissons aujourd’hui.
Que dire de l’incidence sur les marchés d’Omicron, le variant préoccupant qui a été décelé récemment dans le contexte de la pandémie de COVID-19?
À l’automne, il semblait que le plus dur de la pandémie était derrière nous. Puis, le variant Omicron est apparu et, en un rien de temps, nous nous sommes tous retrouvés de nouveau sur le qui-vive, y compris les investisseurs. Rappelons que les marchés boursiers ont enregistré leurs pires liquidations en l’espace d’une journée quand la nouvelle de ce variant a fait, pour la première fois, la une des médias. Pourtant, les marchés ont depuis relégué Omicron au second rang, car il a joué un rôle plutôt ténu dans le rendement des actions et des obligations, récemment. Cette situation ne va visiblement pas changer, maintenant que le nombre de cas et d’hospitalisations est sur le point d’atteindre son point culminant dans plusieurs pays.
Néanmoins, cela ne signifie pas qu’Omicron ne représente plus une menace : il est assurément à l’origine d’un déclin de l’activité économique ces deux derniers mois, et il pourrait faire subsister les perturbations qui touchent actuellement les chaînes d’approvisionnement à l’échelle mondiale, surtout maintenant qu’il a été détecté en Chine, l’un des centres de fabrication les plus actifs dans le monde. Pourtant, s’il y a bien une source d’inquiétude chez les investisseurs ces jours-ci, ce n’est pas Omicron, mais plutôt le resserrement des conditions monétaires qui les guette.
Kevin McCreadie est chef de la direction et chef des investissements de La Société de Gestion AGF Limitée. Il contribue régulièrement à Perspectives AGF.
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Les points de vue exprimés dans cet article sont ceux de l’auteur et ne représentent pas nécessairement les opinions d’AGF, de ses filiales ou de ses sociétés affiliées, et ne peuvent être associés à aucun fonds ni à aucune stratégie d’investissement.
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