
Pourquoi les actifs réels sont à un point d’inflexion
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Le 26 mai 2022
Depuis pratiquement 40 ans, l’économie mondiale compose avec un cycle structurel de baisse des taux d’intérêt. Peut-on vraiment se surprendre que les répercussions généralisées du resserrement monétaire des banques centrales cette année aient pris certains investisseurs au dépourvu? Après tout, la plupart ne sont tout simplement pas assez âgés pour se rappeler ce qui se passe lorsque les autorités monétaires commencent à retirer de l’argent de l’économie. Ces jours-ci, toutefois, ils le voient distinctement, et l’image est d’autant plus saisissante avec, en arrière-plan, la guerre en Europe et les effets persistants de la pandémie de COVID-19. Les obligations, soutenues par un marché haussier qui a duré plus de 30 ans, et les actions, qui brillaient encore en décembre dernier, ont été malmenées. Il y a pourtant une faible lueur d’espoir du côté d’une catégorie d’actif qui affiche une tendance à la baisse depuis plus d’une décennie : les produits de base et les autres actifs réels.
Au cours des quatre premiers mois de 2022, l’indice du Commodity Research Bureau (CRB), qui fournit une mesure approximative des prix mondiaux de l’énergie, des produits agricoles et des métaux de base et industriels, a augmenté de plus de 40 %, selon Trading Economics. Les motifs à court terme sont incontestables, mais ils ne disent pas tout. De toute évidence, les prix des produits de base ont fortement augmenté, car le conflit entre la Russie et l’Ukraine a limité l’accès au pétrole russe (environ 10 % de la production mondiale, selon l’Agence internationale de l’énergie) et à une part importante des exportations mondiales de céréales du reste du monde, tout en ajoutant aux perturbations des chaînes d’approvisionnement, déjà fragilisées par les problèmes liés à la pandémie. Pourtant, même si la guerre en Ukraine a agi comme catalyseur, un facteur à long terme entre aussi en jeu, à savoir le cycle des taux d’intérêt.
Au cours des dernières décennies, la faiblesse des taux a fait en sorte que le capital était bon marché et abondant. Le contexte de taux d’intérêt expansionniste et relativement stable a favorisé les actifs à durée plus longue, comme les obligations et les actions à rendement élevé, ce qui a donné lieu à des surinvestissements dans ces catégories. En revanche, les actifs à forte intensité de capital à court terme, comme les produits de base, ont généralement fait l’objet de sous-investissements, tant sur les marchés que dans le monde réel. Résultat : les capacités de production et de transport ont diminué. Et maintenant, les pressions exercées par la guerre, les perturbations de la chaîne d’approvisionnement et la résurgence de la demande de produits en fin de pandémie ont amené ces contraintes à un point d’inflexion critique. Toute capacité excédentaire qui existait auparavant a rapidement été utilisée, limitant la production et la distribution d’énergie et de métaux essentiels. Cela a causé une forte augmentation des prix.
Même si la situation a été déclenchée par des événements à court terme, cela faisait des années qu’elle se préparait. Pour l’instant, nous pouvons nous attendre à ce que les sociétés œuvrant dans le secteur des actifs réels – qui comprennent principalement les produits de base, mais aussi d’autres actifs à forte intensité de capital à faible croissance, comme l’immobilier, les services publics, les infrastructures et les télécommunications – mettent davantage l’accent sur le réinvestissement de leurs bénéfices. Il faudrait pour cela non seulement augmenter la capacité de production, mais aussi développer les infrastructures qui la soutiennent. Les tendances sectorielles à long terme, comme la transition vers une économie plus verte, pourraient également avoir un effet bénéfique en ranimant et en réorientant les investissements.
C’est dans ce contexte macroéconomique que s’inscrit la remontée des produits de base, et celui-ci fait ressortir les occasions qui continuent de se présenter aux investisseurs. Cela dit, ces occasions seront aussi déterminées par d’autres facteurs propres au secteur et à la société, bien entendu.
Par exemple, ce sont les marchés de l’énergie qui ont été les plus touchés par la guerre en Ukraine, car après des années de sous-investissement dans la capacité de production depuis l’effondrement des prix en 2015, c’est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. À l’heure actuelle, les prix du pétrole côtoient déjà des sommets historiques, mais ils devraient être perçus dans le contexte de l’utilisation des capacités et des coûts de production. Le prix du baril est supérieur à 100 $US alors que la majeure partie de la Chine est confinée et que l’économie européenne a ralenti, mais jusqu’où pourra-il aller quand la croissance mondiale retrouvera son élan?
Il est d’ailleurs peu probable que les grandes exportations de pétrole russe reprennent de sitôt. La Russie restera probablement un État paria, même si le conflit avec l’Ukraine est résolu; les problèmes de production et de transport persévèreront sans doute pendant des mois, voire des années. À l’approche de la saison des voyages en voiture (qui devrait être encore plus occupée qu’en temps normal, compte tenu de la levée des restrictions liées à la pandémie), le prix du pétrole pourrait remonter autour des 120 à 130 $US le baril cet été, ce qui maintiendrait les prix de l’essence à des niveaux élevés. Pour les investisseurs, ces perspectives à court terme rendent intéressantes les valorisations des actions des sociétés pétrolières, même aux prix actuels du pétrole brut de référence, car ces dernières profitent d’une amélioration considérable de leurs flux de trésorerie. Malgré le réinvestissement de ces sommes dans la production, il n’est pas possible d’accroître rapidement l’offre énergétique, qui restera vraisemblablement limitée. Et les perturbations de la chaîne d’approvisionnement – qui ont une incidence sur le pétrole et le gaz naturel, mais aussi sur l’acier et le charbon en passant par les engrais et la main-d’œuvre – persisteront probablement encore quelque temps.
Mis à part le secteur de l’énergie, les perspectives des actions liées aux actifs réels sont plus contrastées. Dans les secteurs de l’immobilier et des infrastructures, la hausse des taux pourrait poser un défi important, car ces secteurs dépendent du financement. Tout coûte plus cher à construire, aussi bien les tours de transmission que les lignes de haute tension et même les autoroutes à péage, non seulement en raison des coûts d’emprunt, mais aussi de l’inflation des salaires, des matériaux et du transport. En revanche, les services publics disposent généralement d’une certaine souplesse pour répercuter les coûts plus élevés sur les consommateurs – protégeant ainsi leurs marges et leurs investisseurs contre l’inflation – et la réouverture de l’économie mondiale devrait être avantageuse pour les infrastructures de transport, comme les aéroports et les ports, à court et à moyen terme. À long terme, la transition vers une économie verte, moins dépendante des combustibles fossiles et misant sur des infrastructures capables de résister au réchauffement climatique, devrait créer une demande de capitaux dans l’ensemble des actifs réels – et des occasions pour les investisseurs.
Comme on pouvait s’y attendre, les marchés ont été très volatils, car la reprise de l’économie mondiale et les solides bénéfices des sociétés se sont brusquement heurtés au risque géopolitique élevé, aux perturbations de la chaîne d’approvisionnement, à l’inflation et au resserrement des conditions monétaires. Et à long terme, nous ne savons toujours pas si la tendance sectorielle des taux d’intérêt à la baisse est vraiment arrivée à sa fin. En période d’incertitude comme celle-ci, il peut être difficile d’agir de façon stratégique plutôt que tactique. Pourtant, à notre avis, les perspectives des actifs réels – soutenues à la fois par les tendances à long terme et par les événements récents dont l’incidence devrait durer – offriront des occasions aux investisseurs stratégiques s’ils peuvent faire abstraction des rumeurs, considérer les structures sur lesquelles s’appuient les bénéfices et tolérer la volatilité qui devrait probablement persister pendant le reste de l’année.
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