Tempérez votre enthousiasme : l’évolution de la délocalisation à proximité pourrait être plus lente que les investisseurs ne le pensent
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Le 11 avril 2023
Les tendances commerciales ou, plus précisément, les attentes à l’égard des tendances commerciales suscitent l’engouement. L’enthousiasme actuel à l’égard de la délocalisation à proximité pourrait bien être un bon exemple.
Il est toutefois facile de voir d’où provient ce sentiment. La pandémie de COVID-19 a ébranlé les chaînes d’approvisionnement mondiales. Les coûts d’expédition ont monté en flèche et les événements géopolitiques, notamment les relations de plus en plus froides entre la Chine et les États-Unis, ont accentué l’intérêt déjà intense du milieu des affaires pour trouver des moyens de rendre les chaînes d’approvisionnement plus résilientes. Par ailleurs, la hausse des coûts de production en Chine a rendu d’autres destinations de plus en plus concurrentielles.
Si l’on tient compte de tous ces facteurs, il n’est pas surprenant que la délocalisation à proximité, c’est-à-dire le transfert des activités d’une entreprise dans un pays situé à proximité (ou du moins pas en Chine), soit devenue un sujet de discussion important pour les spécialistes en gestion et les investisseurs mondiaux. Selon Glimpse, l’outil de suivi des mentions en ligne, l’intérêt pour la délocalisation à proximité a augmenté de 99 % au cours de la dernière année.
Il est vrai que la délocalisation à proximité augmentera probablement à long terme, et les entreprises mondiales ont de bonnes raisons d’y adhérer, même si ce n’est que dans le cadre de la stratégie de chaîne d’approvisionnement « Chine plus un ». Toutefois, ne passez pas l’importante proposition subordonnée « à long terme ».
À l’heure actuelle, il existe d’importantes barrières qui font obstacle à une volonté absolue de délocalisation au Vietnam, au Mexique et en Inde, trois des candidats les plus courants pour la relocalisation des activités à l’extérieur de la Chine. (Pour l’instant, mettons de côté le potentiel de « relocalisation », en particulier aux États-Unis, parce que l’obstacle est évident : des coûts beaucoup plus élevés.) Ces problèmes structurels entrent dans les catégories générales de l’évolutivité, de la productivité et de la capacité des travailleurs, des infrastructures et de la primauté du droit.
Par exemple, le Vietnam semble bien placé pour profiter des stratégies « Chine plus un », compte tenu de ses avantages par rapport aux autres pays asiatiques. Il se trouve à la frontière de la Chine et au centre des États de l’ANASE, ce qui facilite l’expédition. La main-d’œuvre est jeune et les coûts de celle-ci sont faibles comparativement, par exemple, à ceux de la Malaisie ou de la Chine. Selon Statista, les coûts de la main-d’œuvre manufacturière vietnamienne ont été de 2,99 $ US l’heure en moyenne en 2020, par rapport à 6,50 $ US en Chine. L’économie du Vietnam est plus développée que celle de la Birmanie; elle est plus stable sur le plan politique que celle des Philippines ou de la Thaïlande et plus accessible que celle de l’Indonésie; elle est généralement moins chaotique que celle de l’Inde.
La situation semble favorable, mais il y a quelques réserves, et elles sont importantes. Même après avoir à peu près doublé ses exportations depuis 2016, le Vietnam est un minuscule pôle manufacturier par rapport à la Chine; sa part des exportations mondiales ne représente qu’environ le dixième de celle de son plus grand pays voisin.
Ce fait n’a rien de surprenant, étant donné que la taille de la population du Vietnam est 15 fois plus petite que celle de la Chine. La productivité de la main-d’œuvre, actuellement supérieure à seulement celle de la Birmanie, du Laos, du Cambodge et du Timor oriental parmi les pays de l’Asie du Sud-Est, est un défi chronique, et le Vietnam manque de travailleurs hautement qualifiés par rapport à la Chine. Bref, compte tenu de son évolutivité et de ses problèmes liés à la main-d’œuvre, le Vietnam ne peut tout simplement pas remplacer la Chine comme pôle manufacturier.
Le Mexique ne peut pas non plus, du moins pas encore. Il présente aussi certains avantages qui semblent en faire un candidat propice pour la délocalisation à proximité. Le Mexique jouit d’une proximité géographique avec la plus grande économie du monde, et il est déjà concurrentiel en tant que pôle manufacturier de la fabrication et du transport de produits à destination des États-Unis, surtout lorsqu’on le compare à d’autres options de délocalisation à proximité en Amérique centrale.
Pourtant, il existe deux obstacles majeurs. Les coûts d’électricité sont les plus élevés, avec des interruptions régulières (qui durent plus de 4 000 heures par année) dans un contexte de lignes de transmission d’électricité congestionnées et de pertes d’électricité. Par ailleurs, la situation du Mexique sur le plan de la sécurité s’est détériorée sous le mandat du président Andres Manuel Lopez Obrador, qui n’a pas encore élaboré de plan crédible pour s’attaquer à l’État de droit en difficulté et à la corruption endémique. À moins qu’on observe des progrès réels sur ces questions, le coût – matériel et de réputation – des activités commerciales au Mexique ne peut qu’augmenter.
Enfin, l’Inde, dont le marché de délocalisation à proximité est haussier, devrait être la « prochaine Chine ». Avec plus d’un milliard de personnes, une main-d’œuvre jeune et un potentiel de croissance du PIB de 7 % à 8 % par année, l’Inde présente un avantage démographique apparent par rapport à la Chine. Toutefois, les gens ne sont pas la seule partie importante de l’équation.
Malgré les réformes favorables aux entreprises de l’administration de Narendra Modi, l’Inde demeure un pays où il est beaucoup plus difficile d’effectuer des activités commerciales que la Chine. Surtout, la Chine possède sans doute la meilleure infrastructure manufacturière à l’extérieur du monde occidental. L’économie chinoise moderne doit sa prédominance à des années d’investissements massifs, et elle éclipse l’Inde à cet égard. Même lors de la pandémie de 2021, la formation brute de capital fixe en Chine représentait 42 % du PIB, comparativement à 29 % en Inde, selon la Banque mondiale. Cette année-là, le secteur manufacturier chinois représentait 27 % du PIB, soit près du double de la part du secteur manufacturier indien. Au rythme actuel des investissements, l’Inde ne rattrapera tout simplement pas son retard.
La réalité est que la Chine, malgré la pandémie, les tensions géopolitiques, le ralentissement de la croissance démographique et l’incertitude économique, demeure la principale destination des fabricants mondiaux. Les préoccupations concernant la résilience de la chaîne d’approvisionnement, bien qu’elles soient justifiées, n’ont pas encore miné sa prééminence dans le secteur manufacturier.
Oui, nous continuons de préconiser un scénario « Chine plus un » où une ou plusieurs solutions de rechange à la Chine deviendront des pays vraiment concurrentiels pour les sociétés mondiales. Toutefois, le détachement complet du principal pôle manufacturier mondial semble très loin.
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